UN TÉMOIN FACE AUX ÉLÈVES

Chaque année, le Forum des Images organise des ateliers multimédias éducatifs. Sous la direction de Mme Geneviève Gambini, en charge de ces ateliers, ces séances plongent collégiens et lycéens dans l’actualité géopolitique reflétée par le cinéma de fiction.
À l’occasion du festival « Guerre d’Algérie : Images et représentation » qui s’est tenu au Forum des Images en janvier 2012, Daniel Videlier, membre de l’EPHMGA a participé à une première série d’ateliers-rencontres ayant pour thème la Guerre d’Algérie. Convaincue par l’intérêt et le succès de ces rencontres, la direction du Forum des Images a depuis fait appel à de nombreuses reprises à M. Videlier pour qu’il revienne animer de nouveaux ateliers.
À l’heure du bilan, M. Videlier nous livre ses réflexions.

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M. Videlier, quelles classes avez-vous rencontré ?
Ce sont surtout des classes de collèges ou de lycées de banlieue, des élèves de 3e ou de 1ere qui sont souvent très intéressées.

Aviez-vous certaines appréhensions à évoquer vos souvenirs de la guerre d’Algérie ?
Non, aucune appréhension pour répondre. Nous sommes des témoins et il n’y a pas de questions indiscrètes, seules les réponses peuvent l’être.

Comment se déroulent les conférences ? Y-a-t-il des films projetés (au Forum des Images) sur lesquels vous pouvez rebondir ensuite ?
C’est d’abord une formation cinéma mais axée sur la guerre d’Algérie donc chaque séquence traite d’un problème de cinéma (zoom, bruitage, etc.) avec des extraits de films sur la guerre d’Algérie. Comme je le dis ci-dessus, je ne raconte pas mon parcours mais plutôt, à travers des extraits de films, tout ce qui traite de la guerre d’Algérie.

Que savent actuellement ces élèves au sujet de la guerre d’Algérie ?
C’est bien là le drame. Ils ne savent pratiquement rien sur la guerre d’Algérie, ni même sur la guerre en général. C’est assez douloureux à découvrir.

Que veulent-ils savoir ? Sur quoi portent leurs questions en général ?
Les questions portent sur la vie que nous menions au quotidien, où nous dormions, comment nous mangions, mais aussi sur la peur, sur la torture…

Quelle est leur réaction à l’écoute de vos réponses ?
Ils sont très intéressés, mais aussi très étonnés de l’énorme décalage sociologique en soixante ans à peine. Je veux parler de la censure qui sévissait à l’époque, du service militaire qui était obligatoire et qui ne l’est plus, des médias, de l’absence de télé…

FDI VIDELIERD’après vous, qu’est-ce qu’il les aura durablement marqué après votre rencontre ?
À mon avis, je dirais tout d’abord le type de guerre que nous menions, la guérilla, le crapahutage, les embuscades. Vient ensuite la durée de cette guerre, qui fut une guerre longue. Il faut alors leur spécifier que nous n’étions censés partir « que » pour deux ans. Il faut voir leur réaction lorsque je leur apprends qu’en tant qu’« ADL » (Au-delà de la Durée Légale), j’ai dû faire bien plus que deux ans : ils s’offusquent presque ! « Mais Monsieur, pourquoi vous ne vous sauviez pas, alors ? » (rires). Et pour terminer, ce qui les étonne aussi, souvent, c’est le peu de réaction qui existait en France métropolitaine vis-à-vis de ce conflit, ce décalage entre ce que nous vivions au quotidien et ce qu’on en disait en métropole, la façon dont on en parlait. Ou dont on n’en parlait pas d’ailleurs. C’est inconcevable, pour eux. Avec les techniques modernes (smartphones, Youtube, Facebook, etc.), cette chape de plomb qui pesait sur la guerre d’Algérie, ils ne peuvent tout bonnement pas la concevoir.

Avez-vous pu discuter avec les enseignants ? Quelles sont leurs attentes ? Ont-ils certaines craintes à évoquer cette guerre aux élèves ?
Malheureusement, les ateliers sont si denses qu’il me reste peu de temps pour discuter avec les enseignants. Ils n’interviennent pratiquement pas durant les ateliers. Et sont bien contents d’avoir un « témoin bavard » ! (rires).

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