Au théâtre de la Bastille, les fantômes intimes de la guerre d’Algérie

Le troisième volet de « Des territoires » confirme le talent de l’auteur et metteur en scène Baptiste Amann à enchâsser l’histoire dans l’actualité.

Par Publié hier à 09h15, mis à jour hier à 10h49

C’est la pièce qu’on attendait : celle qui arriverait à lier l’histoire de la guerre d’Algérie et l’actualité des « quartiers » d’aujourd’hui, avec une justesse et un panache jamais vus jusque-là. On doit ce spectacle, intitulé Des territoires (… et tout sera pardonné ?), à un auteur de 33 ans, Baptiste Amann, qui signe ici le troisième volet d’une trilogie entamée en 2014.

Les deux premiers épisodes, Des territoires (Nous sifflerons la Marseillaise…) et Des territoires (… d’une prison l’autre) étaient déjà plus que prometteurs. Ce dernier volet confirme un talent d’auteur comme il n’en apparaît qu’un ou deux par génération. Comme tout artiste digne de ce nom, Baptiste Amann est bien en train d’inventer son territoire propre, à la croisée de l’histoire, du politique, de l’intime et de l’art.

Lire le portrait (2017) : Théâtre : les territoires gagnés de Baptiste Amann

Ce territoire part de ceux que l’on a souvent dit « perdus » pour la République. Baptiste Amann vient d’Avignon, d’une de « ces zones pavillonnaires qui constituent autant d’angles morts dans notre représentation schématique de la société urbaine, coincée entre deux fantasmes, celui des centres-villes et celui des cités HLM », comme il le dit lui-même. Le pavillon de ses parents faisait face à la cité, et Baptiste Amann écrit à partir de là. Et il écrit somptueusement bien, dans une langue qui ne reste pas engluée au réel, comme on en subit trop de nos jours, où les formes indigentes, platement réalistes, se sont multipliées.

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