Louise Vignaud revient avec « Nuit d’octobre », sur la tragique nuit du 17 octobre 1961. Remarquable !

17 octobre 1961, « ici, on noie les Algériens ». Le lendemain, il ne s’est rien passé, dit le ministre de l’Intérieur. 60 ans après, Louise Vignaud et Myriam Boudenia interrogent l’omission volontaire des crimes d’Etat dans un remarquable spectacle.

« Avant de me dire ta peine, / Ô poète ! en es-tu guéri ? / Songe qu’il t’en faut aujourd’hui / Parler sans amour et sans haine. » dit la muse au poète, dans « La Nuit d’octobre » de Musset. Dans le spectacle nommé en référence à la soirée du 17 octobre 1961 pendant laquelle, sur ordre de Maurice Papon, la police française organisa une ratonnade poliment oubliée par le roman national, Louise Vignaud et Myriam Boudenia obéissent aux injonctions de la muse. Elles parlent sans amour et sans haine, sans hystérie partisane ni œillères idéologiques, pour dire l’humain, le trop humain d’un crime d’Etat qui commanda que soient jetés en Seine, comme Buridan en son temps et pendant longtemps les déchets des égouts, les Algériens venus manifester pacifiquement dans les rues de Paris. L’histoire des relations entre la France et son ancienne colonie n’est toujours pas complètement faite : les mémoires douloureuses de ses protagonistes sont encore trop à vif. Harkis, appelés du contingent envoyés en Algérie pendant la guerre d’indépendance, rapatriés, immigrés venus en France après 1962, participants de la marche pour l’égalité et contre le racisme de 1983 : les comptes ne sont pas réglés, comme si le passé ne passait pas, pour reprendre la formule de Rousso et Conan à propos de Vichy. A cet égard, et de manière extrêmement subtile, Louise Vignaud et Myriam Boudenia choisissent leur muse : Clio plutôt que Mnémosyne.

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