Derrière l’assassinat de la débitante de tabac, le traumatisme de la guerre d’Algérie

Alors que le Courrier picard fêtera en 2024 son quatre-­vingtième anniversaire, plongeons, avec Tony Poulain, dans les archives du journal, au fil des ans. Puisqu’il n’y a pas de rivière sans source ni d’arbre sans racines…
C’est la photo d’un temps où les correspondants de presse arrivaient sur les lieux du crime avec les gendarmes : derrière le comptoir du modeste café-épicerie-tabac de Hem-Hardinval, village de 250 âmes au nord de Doullens, dépasse une paire de chaussures. « Mais le cadavre est derrière le comptoir… », précise la légende. Mlle Germaine Morel – 73 ans, « droite, un peu rude mais d’une rigoureuse honnêteté » – a été égorgée la veille.

Jean-Jacques, 11 ans, a donné l’alerte le 23 janvier 1964 à 8 h 30 après avoir trouvé l’épicerie ouverte mais vide. André, un ouvrier agricole, atteste qu’il est parti à 21 h 45 la veille et qu’il a croisé un ultime client, homme corpulent venant de Gézaincourt, qu’il a entendu commander « un petit rouge » d’une voix bégayante. La brigade de Doullens identifie tout de suite Roger Bocquillon, 23 ans, qui craque à 6 heures, le 24 après une nuit d’interrogatoire : oui, il a tué, comme il l’avait appris pendant la guerre d’Algérie ; « une manchette » derrière la tête puis un coup de son poignard de commando, d’une oreille à l’autre. Pas un sou n’a disparu : « Un crime sans autre mobile que le besoin de tuer », titre le journal, en révélant que l’homme – qui vivra jusqu’en 2016 dans le Vaucluse – « conservait dans son portefeuille des photos de cadavres de la guerre d’Algérie ».

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