Analyse de l’affiche « L’Algérie1830-1930. Pays de grande production agricole »
Analyse de documents
L’affiche : L’Algérie 1830- 1930, Pays de grande production agricole.
Voici un document que l’on trouve dans de nombreux manuels ou qui est facilement accessible. Il peut servir dans le cadre du cours sur l’Algérie coloniale en classe Première (programme 2019). Ce document exprime le discours colonialiste sur l’Algérie française.
Suggestion d’utilisation :
Le document est d’abord situé dans son contexte : celui du centenaire de l’expédition d’Alger dans une France qui sort depuis peu de la Première Guerre mondiale, une France qui, l’année suivante en 1931, organisera la grande exposition coloniale.
Puis, les élèves, guidés par le professeur, sont invités à repérer les éléments constitutifs du document. L’analyse de l’affiche doit les conduire à identifier la vision colonialiste dont il est l’expression et, en conséquence, susciter l’exigence de soumettre son discours à l’analyse historique, à son rapport avec la vérité.
En ce sens, le document peut même être utilisé en début de cours comme document d’accroche.
Une version powerpoint de l’affiche est utile.
Plusieurs dimensions peuvent être abordés dans son analyse : la représentation de l’œuvre coloniale, la représentation des rapports colons/ indigènes, les non-dits (que le professeur doit signaler si le document est présenté en accroche du cours).
L’analyse :
Que veut nous dire ce document ?
. L’ancienneté de la colonisation (100 ans…)
. La transformation du territoire en « pays de grande culture agricole » (visiblement pour un marché en partie extérieur comme le souligne la présence de la vigne en pays musulman) et l’introduction de nouvelles technologies comme le tracteur conduit par un indigène : deux aspects de la « mission civilisatrice »
. La mise en scène d’un héros : le colon, responsable de la transformation du pays ( une allure martiale et décidée (bottes, casque… que la plupart des colons ne portent pas). Un héros dont le regard embrasse son œuvre.
. Les rapports entre colon et indigène : reconnaissance de l’indigène (sourire, regard tourné vers le colon), bienveillance du colon (la main sur l’épaule dans un geste paternaliste)
. Un colon enraciné (littéralement planté) dans le sol (une présence durable)
. Deux mondes qui coexistent (ce qui est souligné par la différence des vêtements) sans se mélanger.
Les non-dits :
. en 1830, la France ne contrôle difficilement qu’une faible partie du territoire algérien
. l’appropriation des terres par les colons (plus de 40% des terres, les meilleures)
. la permanence des révoltes de 1830 jusqu’à la fin du XIXe siècle
En conclusion :
Une vision paradisiaque de l’œuvre coloniale (que l’on retrouve, par exemple, dans la Une de l’almanach du Petit Colon de 1893) qui exprime la continuité des discours sur la mission civilisatrice.
L’important est de conduire les élèves à un regard critique (autre élément de formation que la discipline historique se doit de prendre en compte). Parmi les supports utiles à cette démarche, on peut montrer une affiche du parti communiste en 1930 intitulée 100 ans de domination française. Le contraste des documents illustre de façon binaire deux visions irréconciliables.
Quelques informations apportées par le professeur doivent conduire à créer un besoin d’histoire : qu’en est-il de la réalité ?
L’étude de ce document permet de faire sentir combien les colons estiment « avoir fait l’Algérie ». Un sentiment renforcé par l’ancienneté de l’installation de certaines familles implantées depuis plusieurs générations (et qui ne connaissent pas la métropole). Sentiment qui nourrit à la fois le rejet de toute velléité de remise en cause du statut privilégié mais aussi une relative hostilité à la métropole, aux « francaouis » qui ne « connaissent rien de l’Algérie » et pourraient donc être trop favorables aux revendications indigènes. Autant de sentiments qui joueront à fond lors de la guerre d’Algérie.
Le travail d’analyse avec les élèves peut se concrétiser comme le suggère le document joint : les phrases d’analyse et les flèches, ainsi que la conclusion « Une affiche de propagande… » s’affichant progressivement sur l’écran.
Voir les deux versions de l’affiche jointes :
- L’affiche
- L’affiche avec la trace de l’analyses
Proposition d’analyse de Claude Basuyau