Djemaa Maazouzi, Collège Dawson, Montréal, Canada
Le partage des mémoires de la guerre d’Algérie au cinéma
Un passé de violence coloniale peut nous diviser au présent. Il peut aussi nous rassembler. Dit ou tu, reconnu ou dénié, enseigné ou ignoré, tronqué, dévoyé ou restitué dans l’espace public, inscrit dans l’histoire et la mémoire nationales ou objet d’un oubli historique, ce passé travaille nos rapports à l’autre. De sa transmission à son usage, le souvenir de l’événement est tout autant façonné par l’expérience individuelle que par ce qu’en retient la collectivité. C’est du moins ce sur quoi s’accordent sociologues, psychologues, neurologues ou encore historiens de la mémoire. À partir d’exemples tirés du cinéma nous distinguerons des façons similaires de se souvenir chez des porteurs de mémoires de groupes différents (harkis, immigration algérienne, pieds-noirs, appelés du contingent). Nous verrons comment, mis en scène dans l’œuvre et la dépassant, le procès, la rencontre, le retour et la solidarité dessinent les mémoires de la guerre d’Algérie en France. Chaque scénographie mémorielle, ensemble du dispositif énonciatif qui, au sein de l’œuvre filmique, dit et montre en même temps le souvenir, est animée d’intensités affectives : colère, douleur, angoisse, sympathie. C’est une manière de souvenir de l’événement qui se confond avec la manière de le relater.